L’agent immobilier doit-il rendre public ses tarifs ?
Profitons de l’occasion de la parution de l’arrêté du 10 janvier 2017 afin d’aborder la thématique de la publicité des prix dans la profession d’agent immobilier.
Quels sont les textes applicables ?
Rappelons en premier lieu les dispositions du code de la consommation
L’article L. 112-1 du code de la consommation impose au vendeur de produits ou au prestataire de services d’informer le consommateur sur les prix par voie de marquage, d’étiquetage ou d’affichage ou par tout autre procédé approprié. Cette obligation est sanctionnée par la peine d’amende prévue pour les contraventions de cinquième classe, aucune intention frauduleuse n’étant requise. Cette publicité devra se faire selon des modalités fixées par arrêtés du ministre chargé de l’économie, après consultation du Conseil national de la consommation.
L’article L111-1 du même code impose la communication du prix du service “de manière lisible et compréhensible” avant que le consommateur ne soit lié par un contrat de fourniture de services.
Ensuite, l’article 6-1 de la loi Hoguet créé par la loi Alur indique :
“Toute publicité effectuée par une personne mentionnée à l’article 1er et relative aux opérations prévues au 1° de ce même article mentionne, quel que soit le support utilisé, le montant toutes taxes comprises de ses honoraires exprimé, pour ce qui concerne les opérations de vente, en pourcentage du prix, lorsqu’ils sont à la charge du locataire ou de l’acquéreur.”
L’arrêt du 2 juin 1990 applicable jusque là aux agents immobilier a donc été abrogé par l’arrêté du 10 janvier 2017 précité afin de tenir compte de l’article 6-1 de la loi Hoguet.
Quelles sont les règles applicables à compter du 1er avril 2017 ?
Nous distinguerons deux communications :
– la communication du barème des prix de l’agence
Elle doit se faire à l’entrée des établissements recevant de la clientèle, depuis l’extérieur sur la vitrine desdits établissements dans le même format et au même emplacement que celui normalement alloué aux annonces de vente ou de location, sur chaque vitrine publicitaire située hors établissement destinée aux publicités de vente, et bien évidement sur le site internet de l’agence immobilière.
Lorsque ces prix sont fixés en fonction de la valeur du bien vendu ou du montant du loyer, l’affichage doit indiquer le ou les montants prélevés (TTC), en précisant, le cas échéant, les tranches de prix correspondantes. Lorsque les honoraires proportionnels varient selon les tranches de prix de vente du bien, le professionnel doit préciser de manière très apparente et intelligible si celles-ci sont cumulatives entre elles.
Les « fourchettes » de prix ne sont pas admises puisque l’arrêté exige qu’ils soient fixés pour chacune des prestations proposées (article 2 de l’arrêté).
Les prix affichés sur ce barème doivent être « effectivement pratiqués » (I. de l’article 2). Les services de la DDPP (direction départementale de la protection des populations – anciennement DDCCRF) en déduisent que, par conséquent, les professionnels doivent veiller à appliquer effectivement les prix affichés dans une majorité des transactions auxquelles ils participent. Les rabais par rapport au barème sont autorisés : il est possible d’y déroger dans le cadre des négociations, mais dans des limites proches des conditions pratiquées, seulement à la baisse, et pour des affaires particulières.
Si le barème affiché ne présente pas les prix effectivement pratiqués dans une majorité de transactions ayant abouties, une amende administrative pour non-respect de l’article 2 pourra être prononcée à l’encontre du professionnel. Il s’agit de lutter contre la pratique des faux-rabais.
Le barème doit indiquer systématiquement à qui incombe le paiement de cette prestation (acquéreur ou vendeur). Les mentions du type « honoraires à la charge du vendeur ou de l’acquéreur, selon le choix des parties » ne sont pas conformes à cette obligation, du fait de leur imprécision.
La DDPP précise concernant internet : le barème doit également être aisément accessible en deux clics maximum, par exemple au sein d’un onglet « tarifs » figurant sur la page d’accueil. Il doit également apparaître sur toute page dédiée à l’activité du professionnel, hébergée sur un site internet n’appartenant pas au professionnel et ne comportant pas d’annonces immobilières (Facebook, etc.). Le cas échéant, un renvoi vers le site internet du professionnel, lui-même permettant d’accéder au barème, suffit à remplir cette obligation. Le barème doit être accessible sur toute annonce immobilière dématérialisée : la présence d’un lien hypertexte visible dans le corps de l’annonce, intitulé par exemple « consulter nos tarifs » et renvoyant directement vers la page « tarifs » du site du professionnel, permet de remplir l’obligation.
– la communication dans les annonces immobilières de vente
L’arrêté du 10 janvier 2017 impose l’affichage de certaines mentions dans les annonces de vente d’un bien déterminé, en plus de celles prévues par d’autres réglementations comme le code de la construction et de l’habitation (étiquette-énergie et informations sur la copropriété).
Le prix de vente du bien doit systématiquement figurer sur l’annonce. Selon la DDPP, seuls les biens de prestige pourront, selon les circonstances locales, continuer à bénéficier d’une tolérance administrative et afficher une mention du type « prix : nous consulter ». En effet, il est possible de considérer que les consommateurs auxquels sont destinés de tels biens sont suffisamment avertis, voire susceptibles d’être eux-mêmes assistés par des professionnels.
La mention précisant les modalités de répartition des honoraires doit figurer sur l’ensemble des annonces de vente et pourrait revêtir les formes suivantes :
– « Les honoraires sont intégralement à la charge de l’acquéreur » ou « honoraires charge acquéreur » ;
– « Les honoraires sont intégralement à la charge du vendeur » ou « honoraires charge vendeur » ;
– « Les honoraires sont partagés entre les parties » ou « honoraires partagés entre acquéreur et vendeur ».
Ainsi, dès le stade de l’annonce, le professionnel s’engage sur les modalités de répartition de ses honoraires telles que prévues dans le mandat de vente.
Si des honoraires à la charge de l’acquéreur sont prévus : la part TTC des honoraires à la charge de l’acquéreur doit apparaître en pourcentage calculé en fonction de la valeur du bien entendue hors honoraires, c’est-à-dire du prix « net vendeur ».
Le prix de vente qui apparaît immédiatement au consommateur est celui qui inclut les honoraires à la charge de l’acquéreur. La part des honoraires éventuellement prévus à la charge du vendeur ne doivent pas être compris dans le prix acquitté par l’acheteur. Si les honoraires sont partagés entre les parties, seule la part des honoraires à la charge de l’acquéreur doit apparaître avec une mention selon laquelle les honoraires sont partagés entre les parties, conformément au 2°/ de l’article 3 de l’arrêté du 10 janvier 2017.
En outre, l’annonce doit comporter le prix exprimé honoraires exclus, c’est-à-dire la portion du prix de vente devant revenir in fine au propriétaire (« net vendeur »). Il s’agit de donner à l’acquéreur l’assiette qui sert à calculer le montant des honoraires de l’intermédiaire exprimés en pourcentage, information essentielle lui permettant de calculer facilement les honoraires en valeur absolue.
Exemple : prix de vente hors honoraires de 400 000 euros avec 20 000 € d’honoraires à la charge de l’acquéreur.
prix honoraires inclus : 420.000€
honoraires : 5 % TTC*
prix hors honoraires d’agence : 400.000€
* les honoraires d’agence sont intégralement à la charge de l’acquéreur
Si des honoraires à la charge du vendeur sont prévus : l’annonce doit dans ce cas comporter un seul prix de vente qui ne peut pas inclure les honoraires à la charge du vendeur.
Le prix de vente ne contient pas, juridiquement, le pourcentage prélevé par l’intermédiaire. Le prix indiqué sur l’annonce ne peut donc en aucun cas comprendre les honoraires de l’intermédiaire sous peine de constituer une infraction à l’arrêté du 10 janvier 2017.
En pratique, le vendeur tient compte du fait qu’il a à sa charge les honoraires et majore de ce fait le prix de vente. Celui-ci peut donc comprendre économiquement les honoraires de l’intermédiaire.
De même, le mandat de vente ou le compromis ne peuvent pas comporter de mention indiquant que le prix de vente comprend des honoraires car l’acheteur supporterait des frais qui ne lui sont contractuellement pas imputables.
Exemple : prix de vente hors honoraires à la charge du vendeur 400 000 € avec 20 000 € d’honoraires à la charge du vendeur.
Le vendeur intègre ici économiquement les 20 000 euros d’honoraires dans le prix de vente sans que juridiquement les honoraires soient mis à la charge de l’acquéreur.
prix : 420.000 € *
* les honoraires d’agence sont intégralement à la charge du vendeur
En cohérence, le mandat et le compromis doivent stipuler concomitamment un prix de vente de 420 000 euros et 20 000 euros d’honoraires à la charge du vendeur.
Attention, la DDPP précise que la pratique du, “basculement” est interdite. Cette pratique consiste, dans un premier temps, à stipuler des honoraires à la charge du vendeur dans le mandat de vente, ce qui permet de diffuser des publicités sans afficher le pourcentage d’honoraires. Dans un second temps, ces mêmes agents immobiliers procèdent de manière quasi-systématique à un « basculement » de leurs honoraires pour les mettre à la charge de l’acquéreur.
Le ministère de la justice analyse ce type de pratique comme étant prohibée à la fois sur les plans civil et pénal. Le basculement des honoraires par le biais d’un avenant au mandat de vente initial est une pratique également prohibée nous précisent la DDPP. Il permet d’exonérer de droit d’enregistrement la part des honoraires que l’acquéreur devait supporter.
Ce thème est abordé en détail dans la formation sur les agents immobiliers et la loi Hoguet
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