Servitude de résidence principale après la loi Le Meur
L’article 5 de la loi n° 2024-1039, communément appelée loi « Le Meur », introduit une nouvelle servitude d’urbanisme qui vise à réguler l’usage des logements dans certaines communes. Cette mesure a pour objectif de favoriser l’usage des logements en tant que résidence principale, en particulier dans les zones où la proportion de résidences secondaires est élevée. Ce document examine les implications de cette nouvelle servitude et les conditions de son application.
Contexte et Objectifs
La loi « Le Meur » a été adoptée dans un contexte où de nombreuses communes font face à une forte proportion de résidences secondaires, ce qui peut engendrer des déséquilibres sur le marché immobilier local. En instaurant cette servitude, le législateur cherche à garantir que les nouveaux logements soient principalement utilisés comme résidences principales, contribuant ainsi à la vitalité des centres urbains et à la lutte contre la vacance des logements.
Conditions d’Application
La nouvelle servitude d’urbanisme ne peut être mise en œuvre que dans des zones spécifiques délimitées dans le PLU :
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Zones Urbaines (U) : Les communes doivent disposer d’un Plan Local d’Urbanisme (PLU) et être situées dans des zones déjà urbanisées.
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Zones à Urbaniser (AU) : Les communes peuvent également appliquer cette servitude dans des zones qui sont prévues pour être urbanisées.
Critères de Mise en Œuvre supplémentaires
Pour qu’une commune puisse délimiter des secteurs soumis à cette obligation d’usage, elle doit répondre à l’un des deux critères suivants :
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Proportion de Résidences Secondaires : La part des résidences secondaires doit être supérieure à 20 % du total des logements existants sur le territoire de la commune. Ce seuil a été fixé pour identifier les communes où la présence de résidences secondaires est particulièrement préoccupante.
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Taxe sur les Logements Vacants : La commune doit avoir mis en place la taxe annuelle sur les logements vacants, conformément à l’article 232 du code général des impôts. Cette mesure vise à inciter les propriétaires à remettre leurs logements sur le marché locatif ou à les occuper.
En France, la taxe sur les logements vacants (TLV) s’applique aux logements inoccupés depuis au moins un an, situés dans des zones où l’offre de logements est insuffisante par rapport à la demande. À partir de 2024, cette taxe concerne 46 agglomérations, ainsi que 2 263 communes touristiques.
Par ailleurs, une étude de la direction générale des finances publiques, publiée en juin 2024, indique que 1 461 communes ont institué une majoration de la taxe d’habitation sur les résidences secondaires en 2024, contre 308 en 2023, soit une multiplication par plus de quatre. Désormais, 40 % des communes autorisées se saisissent de cette possibilité.
Ainsi, en combinant ces mesures, ce sont plus de 3 700 communes qui ont mis en place une taxation visant à lutter contre la vacance des logements ou la prolifération des résidences secondaires.
Et la location meublé de tourisme dans tout ça?
Avec une servitude de résidence principale, il n’est généralement pas possible de mettre le bien en location meublée touristique. Cette servitude impose au propriétaire ou à l’occupant d’utiliser le logement comme résidence principale, c’est-à-dire y résider au moins 8 mois par an, sauf obligations professionnelles, raisons de santé ou cas de force majeure.
La mise en location meublée touristique (type Airbnb) implique souvent une occupation de courte durée par des locataires de passage, ce qui est contraire à la notion de résidence principale. Dans ce cadre :
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Contradiction avec l’usage imposé : Louer un bien en meublé touristique empêcherait de respecter l’obligation de l’occuper en tant que résidence principale pendant une durée suffisante.
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Sanctions possibles : Louer un bien en contradiction avec une servitude de résidence principale peut exposer le propriétaire à des sanctions ou des litiges avec les bénéficiaires de la servitude.
En conséquence, les actes de vente, baux et contrats devront mentionner clairement cette servitude, sous peine de nullité. Cela garantit que propriétaires et locataires soient pleinement informés de leurs obligations.
En cas de non-respect, le bail peut être résilié automatiquement, après une mise en demeure et un délai d’exécution d’un an, prorogeable dans des circonstances justifiées. Une astreinte financière, pouvant atteindre 1 000 € par jour (plafonnée à 100 000 €), peut également être imposée.
Notons, que cette servitude s’applique exclusivement aux constructions nouvelles situées dans les zones U et AU définies par les règlements d’urbanisme.
Que peut-on tirer comme conclusion de l’instauration d’une telle servitude de résidence principale?
Enfin, l’article 5 de la loi n° 2024-1039 représente une avancée significative dans la régulation de l’usage des logements en France. En permettant aux communes de délimiter des secteurs où les nouveaux logements doivent être utilisés comme résidences principales, cette loi vise à répondre aux enjeux de l’habitat et à renforcer la cohésion sociale dans les zones urbaines. Les critères d’application, basés sur la proportion de résidences secondaires et la mise en place de la taxe sur les logements vacants, offrent un cadre clair pour l’implémentation de cette nouvelle servitude d’urbanisme.