La loi ELAN et la copropriété
Quelles sont les dispositions du projet de loi ELAN qui concernent la copropriété ?
Nous avons déjà abordé sur ce blog le projet de loi ELAN (lire notre article de présentation : La loi ELAN : quels impacts pour les agents immobiliers, gestionnaires locatifs, syndics ?)
Les discussions parlementaires sur ce projet de loi viennent de débuter. Voici un lien pour suivre l’avancé des débats : http://www.assemblee-nationale.fr/15/projets/pl0846.asp
Concernant la copropriété, ce projet annonce une importante réforme de la loi du 10 juillet 1965.
Nous abordons ce projet de loi ELAN lors de nos formations en immobilier sur Paris, et notamment lors de notre formation sur La copropriété ! N’hésitez pas à nous contacter si vous souhaitez suivre ou mettre en place dans vos locaux une formation sur la loi ELAN et l’immobilier. Tel : 06-51-36-82-18 ou 07-68-32-27-67
Deux articles concernent tout particulièrement la copropriété : les articles 59 et 60. Ces textes sont reproduits en intégralité en fin d’article.
L’article 59 du projet de loi ELAN améliore les outils de traitement des copropriétés dégradées.
D’après l’exposé des motifs du projet de loi, une des principales difficultés opérationnelles rencontrées dans le traitement de ces copropriétés est le traitement des occupants dont la santé et la sécurité sont souvent très menacées dans ces immeubles délabrés en copropriété. De surcroît, comme il s’agit souvent de ménages très pauvres exploités par des propriétaires indélicats, les situations de sur-occupation sont assez fréquentes. Avant même de traiter le bâti, il faut donc reloger rapidement ces occupants dans des logements sûrs. Les mesures présentées au 1° du I et au 3° du I ont pour but de faciliter ces opérations de relogement en veillant à la prise en compte des ménages des quartiers en opération de requalification de copropriétés dégradées (ORCOD) dans l’objectif de 25 % d’attributions de logements hors des quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV) et en permettant au maire et au président de l’intercommunalité de faire usage de leur pouvoir de désignation lorsqu’ils lancent une ORCOD, faculté actuellement ouverte uniquement dans les ORCOD d’intérêt national (ORCOD-IN) et qui permet d’attribuer plus rapidement un logement social du contingent de la commune ou de l’EPCI.
La procédure de carence prévue à l’article L. 615-6 du même code qui permet, après une expertise diligentée par le tribunal de grande instance, de faire constater par ce même tribunal de grande instance l’incapacité d’un syndicat de copropriétaires à pourvoir à la conservation de l’immeuble et qui permet, sur ce fondement, d’engager une procédure d’expropriation à l’encontre des différents copropriétaires constituant le syndicat des copropriétaires, est également sécurisée.
L’article 60 du projet de loi ELAN a pour objet de remédier au constat d’un relatif vieillissement de la loi du 10 juillet 1965.
Cet article autorise le Gouvernement à légiférer par ordonnance, d’une part, pour codifier le droit de la copropriété afin de proposer un texte plus simple, clair et accessible, garant de la sécurité juridique, d’autre part, pour revoir les règles de gouvernance des copropriétés, en les adaptant en fonction de la destination et de la taille de la copropriété afin d’améliorer leur gestion.
Selon l’étude d’impact du projet de loi, la succession de réformes en matière de copropriété ces 20 dernières années a conduit à une certaine complexification des textes relatifs au droit de la copropriété, rendant difficile leur appréhension par les copropriétaires. La jurisprudence s’est efforcée d’apporter des précisions sur des questions fondamentales comme le champ d’application du statut, les conditions de son application aux immeubles en cours de construction, le statut juridique de l’état descriptif de division, la possibilité de constituer des servitudes sur les lots de copropriété ou les conditions de recevabilité des actions intentées par les copropriétaires.
Selon les statistiques du ministère de la Justice pour l’année 2016, les actions tendant à contester les décisions prises par l’assemblée générale des copropriétaires représentent environ 18 % du contentieux de la copropriété soumis aux tribunaux de grande instance. Une simplification du processus de prise de décision par le syndicat favoriserait une baisse de ce type de contentieux.
Cette inflation normative désordonnée, déstabilisant l’équilibre initial du statut de la copropriété des immeubles bâtis, a été remarquée par la doctrine qui voit dans la démarche de codification une façon de restituer à ce droit sa clarté et son accessibilité d’origine, en remédiant aux imperfections et aux insuffisances de la loi du 10 juillet 1965.
Cette démarche rejoint en outre les conclusions du groupe de travail Henri Capitant qui avait exclu l’intégration de la matière dans le code civil au regard du volume des dispositions à codifier.
L’objet d’une réforme de la loi du 10 juillet 1965 est d’aboutir au renouvellement du modèle, d’une part, en levant les blocages qui entravent la réalisation de travaux dans les copropriétés, et, d’autre part, en proposant un texte plus simple, clair et accessible, garant de la sécurité juridique et contribuant à prévenir les contentieux en matière de copropriété.
Parallèlement à cette codification à droit constant, le Gouvernement souhaite prendre des mesures, ayant pour objectifs de prévenir les contentieux et d’améliorer la gestion des immeubles.
Ces mesures sont issues du projet de réforme de la loi du 10 juillet 1965 élaboré par un groupe de professionnels (le GRECCO) qui a été remis à la Chancellerie puis au ministère de la cohésion des territoires en octobre 2017.
Il est ainsi envisagé de redéfinir le champ d’application de la loi du 10 juillet 1965 au regard des caractéristiques des immeubles, de leur destination et de la taille de la copropriété d’une part et des règles applicables à ces copropriétés d’autre part.
La doctrine majoritaire estime nécessaire de prévoir des aménagements ou assouplissements tenant compte de la diversité des types de copropriétés (petites copropriétés, copropriétés ne comprenant que deux copropriétaires, grandes copropriétés, copropriétés comportant exclusivement des lots de bureau ou de commerce…).
Plusieurs pistes de réflexion sont à l’étude pour simplifier la gestion de ces copropriétés :
– dispense de syndic, de conseil syndical,
– assouplissement des règles de convocations et de tenue des assemblées générales,
– facilitation des actions en paiement de la quote-part de parties communes contre un copropriétaire,
– application de certaines règles relatives à l’indivision,
– recours simplifié au syndicat coopératif, etc.
La question de l’application du statut aux copropriétés à destination exclusivement commerciale ou de bureaux fera aussi l’objet d’une attention particulière (application supplétive ou création de dispositions dérogatoires).
Il est également prévu de :
– Renforcer le rôle du conseil syndical
– Moderniser le processus de décision par les assemblées générales
– Moderniser la gestion financière des copropriétés pour la rendre plus efficace.
A suivre….
Le texte du projet de loi ELAN :
Améliorer le droit des copropriétés
Article 59
- – Le code de la construction et habitation est ainsi modifié :
1° Le vingt-deuxième alinéa de l’article L. 441-1 est complété par les mots : « ou d’une opération de requalification des copropriétés dégradées définie aux articles L. 741-1 et L. 741-2. » ;
2° L’article L. 615-6 est ainsi modifié :
- a) Au I, les mots : « ou sur requête » sont supprimés ;
- b) Le premier alinéa du III est remplacé par les dispositions suivantes :
« III. – Les conclusions de l’expertise sont notifiées, avec la décision qui l’ordonne, au propriétaire, au syndicat des copropriétaires et aux copropriétaires ou, s’il y a lieu, à l’administrateur provisoire ou au représentant légal de la société d’attribution, de la société civile immobilière ou de la société coopérative de construction, au représentant de l’État dans le département, au maire de la commune ou au président de l’établissement public de coopération intercommunale compétent en matière d’habitat. Cette notification vaut intervention forcée à l’instance. » ;
- c) Au deuxième alinéa du III, le mot : « judiciaire » est remplacé par les mots : « au représentant de l’État dans le département » ;
- d) Au troisième alinéa du III, les mots : « après avoir entendu les parties dûment convoquées » sont remplacés par les mots : « les parties dûment entendues ou appelées » ;
- e) Au premier alinéa du IV, après les mots : « syndicat des copropriétaires, » sont insérés les mots : « aux copropriétaires, » ;
3° L’article L. 741-1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Pour assurer le relogement, à titre temporaire ou définitif, des occupants des logements dans les copropriétés situées dans le périmètre des opérations mentionnées au premier alinéa, le maire et le président de l’établissement public de coopération intercommunale, signataires de la convention prévue au troisième alinéa, peuvent user des prérogatives qu’ils tiennent des troisième et quatrième alinéas de l’article L. 521-3-3. » ;
4° Au premier alinéa de l’article L. 741-2, les mots : « si le site comporte une ou plusieurs copropriétés bénéficiant d’un plan de sauvegarde défini à l’article L. 615-1 du présent code » sont supprimés et les mots : « au dernier alinéa » sont remplacés par les mots : « à l’avant-dernier alinéa ».
- – L’article L. 522-1 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Un décret pris sur avis conforme du Conseil d’État peut autoriser la prise de possession d’un ou plusieurs immeubles dégradés situés dans le périmètre défini par le décret mentionné à l’article L. 741-2 du code de la construction et de l’habitation, dont l’acquisition est prévue pour la réalisation d’une opération d’aménagement déclarée d’utilité publique, lorsque des risques sérieux pour la sécurité des occupants rendent nécessaires la prise de possession anticipée et qu’un projet de plan de relogement des occupants a été établi. »
III. – Les dispositions prévues au 2° du I sont applicables aux procédures ouvertes à compter de la date d’entrée en vigueur de la présente loi.
Article 60
- – Dans les conditions prévues à l’article 38 de la Constitution, le Gouvernement est autorisé à procéder par ordonnance à l’adoption de la partie législative d’un code relatif à la copropriété des immeubles bâtis afin de regrouper et organiser l’ensemble des règles régissant le droit de la copropriété. Le Gouvernement peut, à ce titre, apporter les modifications qui seraient rendues nécessaires pour assurer le respect de la hiérarchie des normes et la cohérence rédactionnelle des textes ainsi rassemblés, harmoniser l’état du droit, remédier aux éventuelles erreurs et abroger les dispositions devenues sans objet.
- – Le Gouvernement est également autorisé à prendre par ordonnance, dans les conditions prévues à l’article 38 de la Constitution, les mesures relevant du domaine de la loi visant à améliorer la gestion des immeubles et à prévenir les contentieux, destinées à :
1° Redéfinir le champ d’application et adapter les dispositions de la loi du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis au regard des caractéristiques des immeubles, de leur destination et de la taille de la copropriété d’une part et modifier les règles d’ordre public applicables à ces copropriétés d’autre part ;
2° Clarifier, moderniser et adapter les règles d’organisation et de gouvernance de la copropriété, celles relatives à la prise de décision par le syndicat des copropriétaires ainsi que les droits et obligations des copropriétaires, du syndicat des copropriétaires, du conseil syndical et du syndic.
III. – L’ordonnance mentionnée au II est prise dans un délai de douze mois à compter de la publication de la présente loi. L’ordonnance mentionnée au I est prise dans un délai de vingt-quatre mois à compter de la publication de la présente loi.
Un projet de loi de ratification est déposé devant le Parlement dans un délai de trois mois à compter de la publication de chaque ordonnance.