Fin des passoires thermiques : quels impacts pour les métiers de syndic, gestionnaire et agent immobilier
La loi énergie et climat va être le moyen de réglementer comme annoncé partout depuis le printemps la mise en location et en vente des biens qualifiés de « passoires thermiques ». Les propriétaires immobiliers et leurs gestionnaires ont de quoi s’inquiéter.
A ce jour on ne compte pas moins de 7,2 millions de logements concernés sur le territoire.
Cette mesure a pour objectif d’améliorer le parc immobilier et devrait pousser les propriétaires à rénover l’habitat avant toute mise en location ou vente.
Une telle obligation existe déjà pour certains propriétaires comme les bailleurs sociaux qui dans le cadre de la vente de leur parc de logements doivent systématiquement ne mettre sur le marché que des biens classés avec une note maximale en E par les DPE sauf à contracter une VIR avec les acquéreurs (nouveauté issue de la loi ELAN du 23 novembre 2018). Rien d’étonnant à ce que le parc immobilier entier soit touché au nom de l’impact énergétique des biens.
Que vous soyez un propriétaire de bâtiments tertiaires ou d’habitation vous n’échapperez pas à l’obligation de rénover votre parc, qu’on se le dise !
Cet article présente les points importants de la future loi Energie et Climat en matière de location et vente immobilière.
I/ La performance énergétique et le bail d’habitation :
– Le bailleur et le locataire face aux performances thermiques du logement :
Dans le cadre de la future réglementation qui devra entrer en vigueur au plus tard le 1er janvier 2023, le locataire pourra toujours faire une action en justice pour que soit constater que son logement ne répond pas aux conditions de performance énergétiques fixées par décret. Le juge saisi pourra toujours obliger le bailleur à exécuter des travaux de mise en conformité ou suspendre les loyers, consigner ceux-ci.
Cependant, le texte présenté par la Commission Mixte paritaire prévoit une cause exonératoire au profit du bailleur dès lors que « le logement fait partie d’un immeuble soumis au statut de la copropriété et que le copropriétaire concerné démontre que, malgré ses diligences en vue de l’examen de résolutions tendant à la réalisation de travaux relevant des parties communes ou d’équipements communs et la réalisation de travaux dans les parties privatives de son lot adaptés aux caractéristiques du bâtiment, il n’a pu parvenir à un niveau de consommation énergétique inférieur au seuil maximal. »
NDLR : il est prévu que les nouveautés du texte ne régiront pas les baux en cours de validité au jour de la publication du décret à venir.
– Quand la consommation énergétique pénalise le prix du bail à compter du 1er janvier 2021 :
On attend un durcissement en la matière notamment dans les villes de plus de 50 000 habitants pour lesquels le prix des loyers est réglementé et un montant maximum d’évolution des loyers des logements vacants et des contrats renouvelés existe. Ainsi qu’un régime particulier de prise en compte de l’évolution du loyer.
Le texte tel qu’il a été adopté prévoit que le décret attendu ne pourra prévoir d’adaptation particulières (dérogation) pour la réévaluation du prix du loyer des logements qui ont certes fait l’objet de travaux ou qui sont manifestement sous évalués dès lors que leur consommation énergétique primaire sera supérieure ou égale à 331 kilowattheures par mètre carré et par an.
De plus le bailleur ne pourra obtenir une contribution pour les travaux d’énergie réalisés dans le logement ou les parties communes que lorsque « qu’un ensemble de travaux ait été réalisé et que le logement ait une consommation énergétique primaire inférieure à 331 kilowattheures par mètre carré et par an. »
Le rôle du syndic et du gestionnaire en matière de performance énergétique des bâtiments à usage d’habitation
Le syndic et le gestionnaire auront un rôle de conseil important à jouer dans cette démarche nationale pour ne pas bloquer le marché immobilier. Ces deux acteurs feront donc alliance pour la lutte contre les passoires thermiques dans l’intérêt de leurs clients respectifs. Il faudra donc envisager d’utiliser au mieux le DTG pour y inclure des travaux sur les parties communes concourant à la baisse de consommation énergétique de l’immeuble. De son côté le gestionnaire devra s’attacher à suivre le patrimoine et à anticiper les départs de locataire et les travaux intérieurs nécessaires pour atteindre les objectifs fixés par le futur texte de loi.
III/ Un DPE plus précis dès le 1er janvier 2022 :
L’article L 134-1 du CCH est modifié pour imposer aux diagnostiqueurs d’indiquer dans leur rapport le montant des dépenses théoriques de l’ensemble des usages énumérés dans celui-ci. Ainsi, la modification emporte pour les locataires et acquéreurs une meilleure information leur permettant une plus précise anticipation de leurs dépenses en matière d’énergie.
Le contenu du DPE est également modifié à cette même date : un audit énergétique devra être intégré à ce diagnostic pour tout logement ne remplissant pas l’obligation du respect d’un seuil maximal de consommation énergétique fixé à 331 kilowattheures par mètre carré.
Cet audit dont le contenu sera précisé par décret, devra prévoir les travaux permettant d’atteindre des objectifs de très haute performance énergétique du bâtiment et l’atteinte du seuil maximal précité. De même, « il mentionne à titre indicatif l’impact théorique des travaux proposés sur la facture d’énergie. Il fournit des ordres de grandeur des coûts associés à ces travaux et mentionne l’existence d’aides publiques destinées aux travaux d’amélioration de la performance énergétique. »
Les résultats du DPE nouvelle mouture aura également un impact sur le contenu des futures publicités de vente et location dès cette date. En effet, le texte prévoit que les annonces même publiées sur des plateformes électroniques devront indiquer selon les résultats du DPE, le montant des dépenses théoriques de l’ensemble des usages énumérés dans le diagnostic de performance énergétique.
Attention, le professionnel en charge de vendre ou de louer ces biens qui méconnaîtrait cette obligation sera passible d’une amende administrative dont le montant ne peut excéder 3 000 euros pour une personne physique et 15 000 euros pour une personne morale. Le contrat de location devra également contenir une telle indication à titre informatif.
IV/ Plafonnement de la consommation des bâtiments à usage d’habitation dès le 1er janvier 2028 :
Le plafonnement de la consommation énergétique de ces bâtiments connaît un calendrier d’application qui va de janvier 2022 à janvier 2033, le temps de publier un décret précisant les modalités d’application de la future loi.
La nouveauté apportée par le texte est l’insertion dans le Code de la construction et de l’habitation d’un article L111-10-4-1 afin d’imposer dès le 1er janvier 2028 un seuil maximal de consommation énergétique de 330 kilowattheures d’énergie primaire par mètre carré et par an des bâtiments à usage d’habitation.
Le texte prévoit tout de même des exceptions qui seront précisées dans un Décret à venir pour :
– Les bâtiments qui du fait de leur particularité ne peuvent par le biais de travaux attendre ce seuil
– Les bâtiments pour lesquels atteindre ce seuil serait un investissement disproportionné par rapport au résultat escompté
Un délai supplémentaire fixé au 1er janvier 2033 est accordé pour certaines catégories de copropriétés telles que celles en difficultés avérées, ou encore placées sous administration provisoire…
Cette nouvelle règle aura un impact dans le cadre de la location ou de la vente de biens immobiliers également. En effet, le professionnel de l’immobilier en charge de la vente (agent immobilier, agent commercial, mandataire immobilier) ou de la location de ces biens (gestionnaire) devra modifier ses annonces et préciser cette obligation dès le 1er janvier 2022.
De même le bail ou l’acte de vente signé devra reprendre cette information. De plus, à compter de l’entrée en vigueur du texte soit à compter du 1er janvier 2028, les annonces et actes liés devront indiquer que le bien ne rempli pas le seuil maximal imposé par le texte.