Réforme de la copropriété : tout savoir et comprendre sur l’ordonnance du 30 octobre 2019
Une grande réforme de la copropriété vient d’être adoptée par la publication de l‘ordonnance n°2019-1101 du 30 octobre 2019. Cette réforme était attendue depuis bientôt un an suite à la publication de la loi ELAN du 23 novembre 2018 qui avait habilité le gouvernement à légiférer en la matière.
Cette réforme a pour but de clarifier, moderniser et adapter les règles d’organisation et de gouvernance de la copropriété. Le rôle du syndicat des copropriétaires, du syndic, du Conseil syndical et du Président du conseil syndical sont complétés et renforcées sur de nombreux points. Les principales organisations professionnelles (FNAIM, UNIS…) saluent ce texte ambitieux qui répond aux besoins des principaux acteurs qui ont été longuement consultés avant la publication, notamment via le CNTGI.
La plupart de ces dispositions entreront en vigueur le 1er juin 2020. D’ici là, il faut espérer que le décret du 17 mars 1967 soit également mis à jour avant le 1er juin 2020 dans un soucis de cohérence (on attendrait la réécriture ou la création d’une soixantaine d’article de ce décret suite à la parution de l’ordonnance).
D’ici novembre 2020, une autre ordonnance doit être publiée : la codification de la loi du 10 juillet 1965 à droit constant.
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Nous avons publié la semaine dernière un comparatif de la loi du 10 juillet 1965 avant et après l’ordonnance du 30 octobre 2019.
Nous vous présentons aujourd’hui de manière synthétique les principales dispositions de cette réforme.
Attention cet article n’est pas exhaustif, il s’agit d’une sélection de certaines dispositions nous paraissant les plus importantes pour les praticiens (syndic, administrateurs de iens…).
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La réforme de la copropriété et le champ d’application de la loi du 10 juillet 1965
Il est précisé que la destination des immeubles soumis au régime de la copropriété doit être à usage total ou partiel d’habitation.
L’ordonnance réserve donc le régime de la copropriété à titre obligatoires aux immeubles d’habitation.
Pour les autres immeubles, le régime est supplétif : les immeubles de bureaux ou encore les centres commerciaux pourront adopter un autre régime à deux conditions :
- adopter une convention prévoyant une dérogation expresse au régime de la copropriété (en adoptant le régime de la division en volumes par exemple)
- mettre en place une structure dotée de la personnalité morale (type ASL)
Le tout devant être suffisamment structuré pour permettre la gestion d’équipements communs.
Pour les ensembles immobiliers existants au jour de la réforme, il est possible de sortir du régime de la copropriété par une décision unanime.
La loi ALUR avait également réglementer la scission de copropriété en volumétrie : l’ordonnance supprime à cet égard l’avis préalable du maire et l’autorisation préfectorale préalable.
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La réforme de la copropriété et les règles applicables au syndicat des copropriétaires
L’ordonnance facilité le recours au syndicat coopératif : toute copropriété pourra dorénavant faire le choix de recourir à la forme du syndicat coopératif ; l’obligation de prévoir expressément cette modalité de gestion dans le règlement de copropriété est supprimée.
De plus, l’objet du syndicat des copropriétaires est étendu : il a désormais pour objet non seulement la conservation et l’administration des parties communes, mais également leur amélioration.
Enfin, la responsabilité du syndicat est étendue à l’ensemble des dommages causés aux copropriétaires et aux tiers ayant pour origine les parties communes et non plus aux seuls dommages occasionnés par un vice de construction ou un défaut d’entretien.
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La réforme de la copropriété et le Conseil syndical
Le pouvoir du conseil syndical est renforcé : le président du conseil syndical peut désormais, en cas de carence ou d’inaction du syndic et sur délégation expresse de l’assemblée générale, exercer une action contre le syndic en réparation du préjudice subi par le syndicat. En l’absence de conseil syndical, cette action peut être engagée par un ou plusieurs copropriétaires représentant au moins un quart des voix de tous les copropriétaires. Les frais sont supportés par le syndicat.
Les membres du conseil syndical peuvent désormais être désignés parmi les ascendants ou descendants des copropriétaires.
La liste des personnes ne pouvant être membre du conseil syndical a été étendue aux préposés du syndic, ainsi qu’à leurs conjoints et partenaires de PACS, leurs concubins, leurs ascendants ou descendants, leurs parents en ligne collatérale, jusqu’au deuxième degré.
Le conseil syndical transformé en conseil d’administration
Désormais, l’assemblée générale peut déléguer au conseil syndical à la majorité de l’article 25, lorsqu’il est composé d’au moins trois membres, le pouvoir de prendre seul des décisions relevant de la majorité simple (majorité de l’article 24).Cette décision est adoptée à la majorité des voix de tous les copropriétaires (majorité de l’article 25) . L’assemblée générale devra déterminer le montant maximum des sommes allouées au conseil syndical pour mettre en œuvre sa délégation de pouvoirs. La durée de la délégation de pouvoirs ne peut excéder deux ans. Elle est renouvelable par une décision expresse de l’assemblée générale. Le syndicat des copropriétaires devra souscrire une assurance de responsabilité civile pour chacun des membres du conseil syndical.
En outre, pour l’exercice de la délégation de pouvoirs, les décisions du conseil syndical sont prises à la majorité de ses membres. En cas d’égalité, la voix du président du conseil syndical est prépondérante. Enfin, le conseil syndical devra adresser un rapport écrit en vue de l’information des copropriétaires.
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La réforme de la copropriété et l’administration de la copropriété
Si un copropriétaire est débiteur de charges, on opère une compensation entre la part du prix découlant de la cession de parties communes revenant à chaque propriétaire et les sommes exigibles par le syndicat des copropriétaires.
Cette règle s’applique aux ventes conclues après l’entrée en vigueur de l’ordonnance (à partir du 1 er juin 2020).
Assemblée générale et réforme de la copropriété
Concernant les règles de majorités, voici les modifications :
- L’autorisation donnée à certains copropriétaires d’effectuer à leurs frais des travaux d’accessibilité n’est plus subordonnée à un vote (à la majorité de l’article 24) de l’assemblée générale, mais fait l’objet d’un point d’information dans les conditions du nouvel article 25-2.
- La suppression des vide-ordures pour des impératifs d’hygiène est décidée à la majorité de l’article 24, et nonplus de l’article 25, tout comme l’autorisation permanente accordée à la police ou à la gendarmerie nationale de pénétrer dans les parties communes.
- Les modalités d’ouverture des portes d’accès aux immeubles sont décidées à la majorité de l’article 25 et non plus 26.
La modification des stipulations du règlement de copropriété relatives à la destination de l’immeuble doit désormais être adoptée à l’unanimité des voix de tous les copropriétaires.
La passerelle de l’article 25-1 est généralisée en prévoyant que lorsque l’assemblée générale des copropriétaires n’a pas adopté la résolution à la majorité de l’article 25 mais que le projet a recueilli au moins le tiers de ces voix, la même assemblée se prononce à la majorité de l’article 24 en procédant immédiatement à un second vote. Cette possibilité s’applique désormais non seulement aux résolutions votées en application de l’article 25 mais également en vertu d’une autre disposition.
Une passerelle de l’article 26-1 est rétabli : il permet, en l’absence de toute disposition contraire, lorsque l’assemblée générale n’a pas décidé à la majorité prévue à l’article 26 alinéa 1 er, mais que le projet a au moins recueilli l’approbation de la moitié des membres du syndicat des copropriétaires présents, représentés ou ayant voté par correspondance, représentant au moins le tiers des voix de tous les copropriétaires, la même assemblée se prononce à la majorité de l’article 25 en procédant immédiatement à un second vote.
Il est précisé que lors de sa transmission aux copropriétaires, le procès-verbal de l’assemblée générale n’a pas à être accompagné de ses annexes.
Lorsque des travaux de surélévation ou de construction de bâtiments aux fins de créer de nouveaux locaux à usage privatif sont réalisés par le syndicat des copropriétaires, les copropriétaires qui bénéficient d’un droit de priorité lors de la vente des lots créés sont désormais uniquement les copropriétaires de locaux situés, en tout ou partie, sous la surélévation projetée” et non plus à ceux “de l’étage supérieur du bâtiment surélevé”.
Travaux d’accessibilité aux frais d’un copropriétaire
Aucune disposition légale n’obligeant le syndicat des copropriétaires à mettre aux normes d’accessibilité les parties communes d’immeubles ne comportant que des logements, un nouvel article 25-2 ouvre la possibilité pour un copropriétaire de faire réaliser, à ses frais, des travaux pour l’accessibilité des logements aux personnes handicapées ou à mobilité réduite qui affectent les parties communes ou l’aspect extérieur de l’immeuble. L’assemblée générale ne peut s’opposer à la réalisation de ces travaux que par une décision motivée par l’atteinte portée par les travaux à la structure de l’immeuble ou à ses éléments d’équipements essentiels, ou par leur non-conformité à la destination de l’immeuble.
Petites copropriétés
Dés règles spécifiques de simplification (possibilité de ne pas avoir de conseil syndical, de double comptabilité…) s’appliquent désormais aux petites copropriétés qui sont définies ainsi :
– syndicat de 5 lots au plus
– ou budget moyen annuel de moins de 15000 euros (sur les trois dernières années – en pratique copropriété d’environ dix lots).
Néanmoins, la dispense d’ouverture d’un compte séparé pour les copropriétés de moins de 15 lots est supprimée. Cette mesure entrera en vigueur le 31 décembre 2020
Syndicat de deux copropriétaires
L’ordonnance détaille des règles spécifiques concernant ces copropriétés notamment concernant le calcul de voix (on ne fait plus application de la règle de main dominante afin d’éviter les blocages).
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La réforme de la copropriété et le règlement de copropriété
L’ordonnance confirme l’impossibilité d’établir une servitude sur une partie commune au profit d’un lot.
Concernant les parties communes à jouissance privative définies par la loi ELAN, l’ordonnance indique que le règlement de copropriété doit préciser les charges que le titulaire du droit de jouissance privative supporte.
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La réforme de la copropriété et le syndic
La révocation du mandat du syndic prévue à titre de sanction en cas de défaut de réalisation de la fiche synthétique est supprimée. La pénalité financière imputée au syndic en l’absence de transmission de la fiche synthétique s’applique désormais au bout d’un mois (et non plus de 15 jours).
Changement de syndic
De plus, la procédure de changement de syndic est précisé afin d’éviter que le syndicat soit dépourvu de syndic.
- lorsque l’initiative de ne pas renouveler le contrat à son terme vient de l’Assemblée Générale, elle doit se prononcer dans les trois mois précédant le terme du contrat.
- lorsque c’est le syndic qui ne souhaite pas renouveler le contrat; il doit en informer le conseil syndical trois mois avant avant l’AG, afin de permettre au Conseil syndical d’organiser la mise en concurrence.
L’assemblée générale désigne un nouveau syndic et fixe les dates de fin du contrat en cours et de prise d’effet du nouveau contrat, ce qui évite qu’un syndic quitte la séance dés la résiliation de son contrat. L’ordonnance détaille également la procédure de résiliation du mandat en cours de mandat.
Honoraires complémentaires pour le syndic
la grande nouveauté de l’ordonnance est la possibilité de percevoir une rémunération complémentaire spécifique en établissant une convention portant sur des prestations de services autres que celles relevant de sa mission de syndic, après autorisation expresse de l’assemblée générale donnée à la majorité simple. Ces prestations ne peuvent figurer dans le contrat de syndic. Le syndic pourra ainsi proposer d’autres services (conciergerie, gardiennage, babysitting, dogsitting…). L’ordonnance élargit ainsi les honoraires imputables au seul copropriétaire (art 10-1 loi 1965) à l’ensemble des honoraires afférent aux prestations effectuées au profit du copropriétaire, ceci en rapport avec les nouvelles prestations qui pourraient être effectués au profit des copropriétaires décrites ci dessus). Seuls les frais d’établissement de l’état daté seront plafonnés (art 10-1, b).
Par ailleurs, une amende administrative (d’un montant maximal de 3 000 euros pour une personne physique et 15 000 euros pour une personne morale) est mise en place pour sanctionner le fait pour le syndic de ne pas utiliser le contrat type légal.
Concernant la désignation du syndic, une mise en concurrence préalable par le conseil syndical doit être réalisée tous les ans désormais (au lieu de tous les trois ans), le Conseil syndical pouvant mettre à l’ordre du jour une dispense chaque année.